L'importance de la récupération

Qu'est-ce que la récupération?

La récupération : un paramètre primordial que beaucoup négligent.
Ça fait plusieurs années que je cours, et ma vision de l’entraînement a beaucoup évolué au fil du temps. J’apprends encore, au fil de mes expériences, grâce aux personnes qui m’entourent, aux bouquins, aux articles, etc. Et s’il y a bien une chose que j’ai remarquée chez une grande partie des coureurs, c’est que la récupération est souvent sous-estimée.

Quand on prépare une course, qu’on se construit un programme d’entraînement (avec ou sans coach), ce qui est souvent oublié, volontairement ou non, c’est la phase de récupération.

Trop souvent, la reprise après une compétition est trop rapide : on ne laisse pas assez de temps au corps pour se remettre. Et c’est là que les blessures apparaissent. Que ce soit un 10 km ou un ultra de plus de 100 km, votre corps a besoin de récupérer. Bien sûr, le temps de récupération est propre à chacun, mais d’expérience (et parce que moi aussi j’ai fait des bêtises), je vais vous donner quelques exemples concrets pour comprendre pourquoi il est essentiel de reposer son corps après une échéance.

En quoi consiste la récupération ?

En un mot : le repos. Physiquement et mentalement, vous avez besoin de recharger les batteries et de laisser votre corps se remettre de l’effort fourni.

Sur le plan physiologique, plusieurs systèmes sont impactés pendant un effort intense ou prolongé, et chacun d’eux doit se remettre à l’équilibre. Voici ce qui se passe concrètement dans votre corps.

Que se passe-t-il dans notre corps durant l'effort?

  1. Le système musculaire

C’est ce qu’on sent le plus après une course : les fameuses courbatures. Mais attention : ne pas en avoir ne veut pas dire que tout va bien !

Pendant l’effort, des micro-lésions apparaissent dans les fibres musculaires, accompagnées d’inflammations locales (raideurs, douleurs) et d’une diminution de la force et de la coordination musculaire (essayez de monter six étages sans ascenseur après un ultra…).

Ces structures doivent se réparer, les réserves de glycogène intramusculaires doivent se reconstituer, les déchets métaboliques doivent être éliminés, et un rééquilibrage hydrique et minéral est essentiel.

Exemple scientifique :

Étude “Muscle mechanical characteristics in fatigue and recovery from a marathon race in highly trained runners” (2007). Chez huit coureurs élite, les chercheurs ont observé une baisse de 22 % de la force maximale volontaire des extenseurs du genou juste après un marathon. Deux jours plus tard, la force était encore réduite de 18 %, et de 12 % après cinq jours.

2. Le système cardiovasculaire

Pendant un effort, le volume sanguin augmente pour alimenter les muscles, les vaisseaux périphériques se dilatent et le cœur subit un stress temporaire (fréquence cardiaque et volume d’éjection accrus).

Après la course, il faut un retour progressif à la normale :

  • stabilisation de la pression artérielle,
  • réajustement du tonus vasculaire,
  • et réhydratation (rétablissement du volume plasmatique).

Source : PubMed – PMID: 4075061

3. Le système nerveux

Le système nerveux central est fortement sollicité pendant un effort long. La fatigue nerveuse s’accumule et le sommeil devient alors crucial pour la récupération.

Exemple :

Étude “Central fatigue assessed by transcranial magnetic stimulation in ultratrail running”. Après un trail de 110 km, les chercheurs ont observé une baisse de 26 % de l’activation volontaire (stimulation transcrânienne) et de 16 % (stimulation nerveuse périphérique) dans les extenseurs du genou.

4. Le système hormonal

Pendant l’effort, l’organisme sécrète de l’adrénaline, du cortisol et d’autres hormones cataboliques, tandis que les hormones anaboliques diminuent. Le repos permet au corps de rééquilibrer naturellement ces niveaux hormonaux.

5. Le système immunitaire

Après une course, on tombe souvent malade : ce n’est pas une coïncidence. Un effort intense provoque une baisse temporaire des défenses immunitaires (cellules NK, immunoglobulines…), rendant le corps plus vulnérable aux virus et infections.

6. L’aspect mental et psychologique

Pendant une course, on vit du stress, de la concentration extrême, et un cocktail d’adrénaline et de dopamine. Résultat : une fatigue émotionnelle qui nécessite, elle aussi, du repos. Le mental a besoin de souffler.

Alors, comment bien récupérer ?

Beaucoup ont du mal à “couper” après une grosse échéance. Certains enchaînent les sorties jusqu’à se blesser, sans comprendre pourquoi. Mais c’est simple : la récupération n’a pas été respectée.

Je comprends qu’arrêter la course à pied plusieurs jours (voire semaines) puisse être difficile quand c’est une habitude quotidienne. Mais croyez-moi : vous préférerez dix jours de repos à deux mois de blessure.

Le conseil de François D’Haene :
Lors de la semaine de l’UTMB 2025, j’ai eu la chance d’échanger avec François D’Haene. Il a évoqué que, peu importe la course, il organise deux semaines post-UTMB sans course à pied, mais avec plein d’activités : emmener ses enfants à l’école, les récupérer, régler les petites choses du quotidien, etc. “Je m’occupe pour ne pas penser à la course à pied”. Honnêtement, je trouve que c’est un super conseil.

Organiser sa récupération comme on organise sa préparation, c’est essentiel : ça évite de ruminer, de culpabiliser, et ça aide à retrouver un équilibre sain.

Mon expérience personnelle 

Après mon premier ultra en février 2025 (Le Poon Tour à La Réunion), les courbatures avaient disparu en quelques jours. Sept jours plus tard, je recourais 6 km (doucement). Dix jours après, je faisais une reco de deux jours pour une autre course et dès les premiers kilomètres, j’ai compris : erreur. Ce n’était pas mon corps, mais ma tête qui disait stop. J’en avais marre, j’avais besoin de couper plus longtemps.

Même chose après la Maxi Race 2025 mais ici c’était le physique qui n’avait pas suffisamment récupéré. J’ai attendu dix jours avant de reprendre, car une petite douleur au genou m’inquiétait. J’ai repris par du vélo, puis un footing de 20-30 minutes. Les sensations étaient bonnes, mais le lendemain, la douleur revenait légèrement.
J’ai donc refait une semaine de pause, sans frustration cette fois. Résultat : reprise progressive, sans douleur.

Aujourd’hui, je n’ai aucun problème à couper 7, 10 jours ou plus s’il le faut, je trouve cela important et ça me fait du bien autant sur le plan physique que mental.

Les piliers d’une bonne récupération

Il y a tout de même des points essentiels pour une bonne récupération :

  • Sommeil : dormir plus si besoin, se coucher tôt, faire des siestes.
  • Hydratation : boire beaucoup, régulièrement.
  • Nutrition : rééquilibrer ce qu’on a perdu.

Pendant un ultra, il est impossible de compenser les pertes énergétiques. C’est après qu’il faut le faire. Et donc il faut manger. Dans la littérature il est recommandé d’avoir un apport glucidique assez important qui correspond à : 10g/kg/j, les jours qui suivent la course. Cette consommation favoriserait une récupération optimale mais c’est aussi une période où l’on souhaite se faire plaisir et donc pour ma part, j’admets manger ce qui me donne envie et de grignoter dès que je le souhaite après un Ultra.

Et lorsque que vous reprenez la règle d’or est : la progressivité. Il est inutile de repartir sur un 10 km direct ou de reprendre par du fractionné. C’est un gros risque de blessure. Il faut y aller tranquillement et voir comment va votre corps, à la moindre alerte, on lève le pieds et on laisse plus de repos. Personnellement, je recommence toujours par 15-20 minutes de footing grand max, et petit à petit je retourne courir plus longtemps.

Et ne négligez jamais le sommeil, bien dormir est aussi important que bien mangé et bien boire. Les jours qui suivent mes ultras je ressens beaucoup de fatigue, je priorise donc cet aspect en essayant de me reposer dès que possible et de ne jamais lutter contre le sommeil.

Quelques astuces pour récupérer « plus vite »

Personnellement, je ne fais rien de particulier pour « récupérer plus vite ». J’attends simplement que mon corps se remette tranquillement, tout en respectant trois piliers essentiels : le sommeil, l’alimentation et l’hydratation. Mais en écoutant différents podcasts — notamment Courir Mieux : “Comment récupérer après un Ultra-Trail” — j’ai découvert trois techniques intéressantes qui peuvent aider à la récupération.

Les bains froids / la cryothérapie : 

C’est un peu une arme à double tranchant. Certaines études ont montré que le froid réduisait les douleurs musculaires après l’effort (Leeder et al., 2011). C’est donc potentiellement bénéfique pour atténuer les douleurs liées aux courbatures mais d’autres recherches ont également montré que le froid freinait certains mécanismes physiologiques naturels impliqués dans la progression musculaire. Autrement dit, en période d’entraînement, ce n’est pas forcément la meilleure méthode si vous cherchez à progresser car cela n’est pas bénéfique. De plus, ça n’aide pas à améliorer votre récupération objective, seulement à diminuer les douleurs musculaires mais physiologiquement il n’y a pas d’impact notable.

Pour aller plus loin, je vous recommande cet article très intéressant de Cyril Forestier sur le sujet : Le froid et la récupération en trail – Courir Mieux

À noter : plusieurs études ont montré qu’il n’y avait pas de différence notable d’effet entre un bain froid et une séance de cryothérapie. (Si ça peut vous éviter de dépenser inutilement de l’argent )

Les massages : 

Les massages, c’est agréable, et plusieurs études l’ont confirmé : ils contribuent à réduire les douleurs musculaires post-effort (Davis et al., 2020). En revanche, cette diminution de la douleur ne s’accompagne pas d’une récupération plus rapide de la force ou de l’endurance musculaire. Autrement dit, le massage soulage, mais il ne fait pas “récupérer plus vite”.

Cela dit, il a un autre intérêt : en réduisant la douleur, il favorise un meilleur sommeil, ce qui, indirectement, aide à la récupération globale.

Mon conseil : si à la fin d’une course vous voyez des kinés proposer des massages, foncez , ça vous fera du bien ! Mais gardez simplement à l’esprit que c’est du confort, pas de la récupération physiologique accélérée. Et si possible, placez ces massages le soir ou avant une sieste : vous dormirez mieux ensuite.

Les vêtements compressifs : 

On le sait, les vêtements compressifs n’améliorent pas la performance pendant l’effort. Mais après la course, c’est une autre histoire. Des études (Brown et al., 2016 ; Marques-Jimenez et al., 2016) ont montré que le port de vêtements compressifs accélérait la récupération musculaire, en favorisant le retour de la force et de l’enduranceLes effets sont d’autant plus marqués après des efforts particulièrement traumatisants (comme les ultras). En plus, ils réduisent les douleurs musculaires.

Les chercheurs estiment que la durée optimale de port est comprise entre 2 et 8 heures :

  • en dessous, pas d’effet notable ;
  • au-dessus, pas de bénéfice supplémentaire.

A bannir : la médication

Je vois souvent passer des posts de personnes qui prennent des anti-douleurs ou anti-inflammatoires pour “mieux récupérer”. Et là, je le dis haut et fort : c’est une énorme bêtise. La médication sportive, c’est non. Prendre un cachet pour masquer une douleur, c’est ignorer un signal d’alerte que votre corps vous envoie. Et c’est souvent la porte ouverte à la blessure.

En conclusion

La récupération est primordiale pour tout coureur, quelle que soit la distance. Écoutez votre corps, reposez votre tête, hydratez-vous, dormez, mangez bien, et surtout : ne reprenez pas trop tôt. Comme vous avez pu le lire, beaucoup de paramètres physiologiques sont sollicités lors d’un effort et vous comprenez que c’est important que tout se remette en place et qu’il faut du temps pour cela.

Je trouve que 10 jours de repos après un ultra, c’est un minimum d’autant plus quand ce sont vos premiers. Plus j’augmente les kilomètres et plus je prends des jours de récupération.
Et souvenez-vous : même les meilleurs le font !

Exemple :

  • François D’Haene : 7 semaines sans courir après l’UTMB. Il explique faire une pause de course à pied qui est nécessaire pour lui en automne en plus de la coupure hivernale (voir poste Insta à ce sujet).
  • Kilian Jornet : 10 jours sans courir après la Chianti by UTMB.
  • Ludovic Pommeret : pas de course la semaine suivant l’UTMB 2025.

Si les élites le font, ce n’est pas pour rien!

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