Le syndrome du surentrainement

Disclaimer : Je ne suis pas professionnelle de santé ni spécialisée dans ce type de syndrome. Si vous pensez être concerné·e, rapprochez-vous de professionnels de santé spécialisés (médecin du sport, nutritionniste, psychologue du sport, etc.) afin d’obtenir un accompagnement adapté.

Depuis quelque temps, je m’informe beaucoup à travers des livres, des articles scientifiques et des témoignages d’athlètes sur le syndrome du surentraînement (Overtraining Syndrome, OTS) et le syndrome RED-S (Relative Energy Deficiency in Sport). Ces deux syndromes peuvent sembler proches, mais leurs origines et traitements sont différents.
Je vais donc consacrer ce premier article au syndrome du surentraînement, avant d’en écrire un second sur le RED-S.

Qu’est-ce que le syndrome du surentraînement ?

Le syndrome du surentraînement est défini comme un déséquilibre persistant entre les charges d’entraînement (et/ou autres stress) et la récupération, entraînant une diminution prolongée des performances sportives (Meeusen et al., 2013).
Il se manifeste par une fatigue persistante, des troubles de l’humeur, du sommeil, et des déséquilibres hormonaux ou immunitaires.

Attention : toutes les fatigues ou baisses de performance ne sont pas synonymes de surentraînement. On distingue trois niveaux :

  1. Surcharge fonctionnelle : surcharge volontaire et maîtrisée provoquant une baisse temporaire des performances, suivie d’une récupération complète et d’une surcompensation (amélioration du niveau initial). C’est une phase normale et bénéfique de l’entraînement.
  2. Surcharge non-fonctionnelle : fatigue prolongée après une charge excessive dépassant les capacités de récupération. Les performances chutent temporairement, sans surcompensation. Cette phase n’est pas bénéfique, mais reste réversible après quelques jours ou semaines de repos.
  3. Syndrome du surentraînement (OTS) : état chronique résultant de surcharges non-fonctionnelles répétées et prolongées. La récupération peut être très longue (plusieurs mois), et parfois certains athlètes ne retrouvent jamais leur niveau initial.

Les causes du surentraînement

La cause principale du surentraînement est une surcharge trop importante, associée à une récupération insuffisante.
Mais la littérature scientifique (Meeusen et al., 2013 ; Kreher & Schwartz, 2012) montre que d’autres facteurs y contribuent :

  • Stress psychologique : pression des résultats, des sponsors, de l’entraîneur, ou encore stress personnel (travail, famille…). Ce stress chronique perturbe les systèmes hormonaux et nerveux, augmentant le risque de surentraînement.
  • Sommeil insuffisant ou mauvaise alimentation, qui empêchent le corps de se régénérer.
  • Infections fréquentes, liées à une altération du système immunitaire.

Le syndrome du surentraînement peut toucher autant les athlètes élites que les amateurs, d’où l’importance de rester à l’écoute de son corps et quelque soit votre niveau.

Peut-on diagnostiquer le syndrome du surentraînement ?

Malgré plus de 30 ans de recherche, il n’existe aucun test biologique ou physiologique spécifique permettant de diagnostiquer de manière certaine un OTS.

Selon le consensus européen et américain (Meeusen et al., 2013, Med Sci Sports Exerc), le surentraînement est un diagnostic clinique d’exclusion :

The diagnosis of overtraining syndrome can only be made after the exclusion of other potential causes of performance decrements.”

En pratique, cela signifie qu’il faut éliminer toutes les autres causes possibles de fatigue ou de baisse de performance (infection, anémie, carence, dépression, troubles hormonaux, surmenage professionnel…).

Les chercheurs (Meeusen 2013 ; Kreher & Schwartz 2012 ; Carrard 2022) s’accordent sur plusieurs signes évocateurs, sans qu’ils soient strictement normés :

Domaine

Signes / indicateurs observés

Performance

Baisse prolongée (>2–3 semaines) malgré repos ou réduction de charge

Fatigue / récupération

Fatigue chronique, récupération lente après effort

Psychologique

Irritabilité, perte de motivation, troubles du sommeil, humeur dépressive

Physiologique

FC au repos ou à l’effort anormale, troubles hormonaux, perturbations immunitaires

Récupération

Nécessité de plusieurs semaines à mois pour revenir au niveau initial

Exclusion médicale

Aucune autre cause médicale n’explique les symptômes

Le diagnostic repose donc sur un faisceau d’indices, et non sur un test unique.

Les marqueurs biologiques (cortisol, testostérone, cytokines, HRV, etc.) varient énormément selon les individus.
Chez les femmes, les valeurs hormonales de référence sont souvent basées sur des populations masculines, ce qui rend l’interprétation encore plus complexe.

Enfin, la frontière entre surcharge non-fonctionnelle et OTS n’est visible qu’a posteriori, selon la durée de récupération.

En pratique, les spécialistes combinent plusieurs approches :

  • Anamnèse complète : entraînement, sommeil, stress, nutrition, contexte de vie.
  • Bilan médical : NFS, ferritine, thyroïde, cortisol, CRP, ECG…
  • Tests de performance : comparaison avec les données antérieures.
  • Questionnaires validés : POMS, RESTQ-Sport, DALDA.
  • Suivi longitudinal : si la baisse de performance persiste >4 semaines sans autre cause → diagnostic probable d’OTS.

Une piste récente intéressante qui a été établi : le score EROS développé par Lemos et al. (2019), mentionné dans le podcast Courir Mieux de Cyril Leforestier (lien ici).

Les conséquences du surentraînement

Les travaux de Meeusen et al. (2013), Kreher & Schwartz (2012) et Carrard (2022) décrivent plusieurs niveaux de conséquences :

1. Sur la performance

  • Baisse prolongée des performances, parfois irréversible.
  • Diminution de la VO₂max, de la puissance maximale et de la vitesse au seuil lactique.
  • Diminution du glycogène musculaire et allongement du temps de récupération post-effort.

2. Physiologiques

  • Dysrégulation hormonale : déséquilibre de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, augmentation du cortisol, baisse du ratio testostérone/cortisol, altération thyroïdienne (T3/T4).
  • Altération immunitaire : baisse des immunoglobulines (IgA), augmentation des infections ORL (Meeusen et al., 2013 ; Walsh et al., 2011).
  • Troubles cardiovasculaires : FC de repos anormale, variabilité cardiaque réduite (Stanley et al., 2013).

3. Psychologiques

  • Fatigue chronique, irritabilité, perte de motivation, humeur dépressive (Budgett, 1998).
  • Troubles du sommeil et de la concentration, anxiété accrue.

4. Nutritionnels et corporels

  • Perte d’appétit et de poids, fonte musculaire.
  • Risque de RED-S si déficit énergétique prolongé (Mountjoy et al., 2018).
  • Perturbation du métabolisme osseux (fractures de fatigue).

5. À long terme

  • Récupération lente, rechutes possibles.
  • Dans certains cas, perte durable du niveau de performance ou fin de carrière sportive.

Comment soigner le syndrome du surentraînement ?

Le repos reste la clé.
Les études (Meeusen et al., 2013 ; Kreher & Schwartz, 2012) montrent qu’aucun traitement miracle n’existe : seule une réduction drastique, voire une interruption de l’entraînement, permet au corps de se régénérer.

  • Repos complet ou très allégé selon la gravité.
  • Sommeil et nutrition : alimentation riche en énergie et glucides pour restaurer les réserves et les fonctions hormonales.
  • Soutien psychologique : relaxation, accompagnement mental, gestion du stress.

Et surtout : consultez un professionnel de santé pour écarter d’autres causes médicales et encadrer la reprise.

Comment prévenir le surentraînement ?

La prévention repose sur un équilibre durable entre charge, récupération et bien-être.
Les études (Meeusen et al., 2013 ; Halson, 2014) recommandent :

  • D’alterner les intensités et planifier des semaines de récupération.
  • De surveiller les signaux faibles : fatigue inhabituelle, sommeil perturbé, baisse de motivation.
  • De suivre régulièrement la fréquence cardiaque au repos, la qualité du sommeil ou les questionnaires de fatigue (RESTQ-Sport, POMS).
  • De maintenir une alimentation suffisante et un sommeil réparateur.
  • De préserver un équilibre psychologique : gérer le stress personnel et la pression de performance.

En résumé : écoutez votre corps, respectez la récupération, et demandez conseil à un professionnel dès les premiers signes anormaux.

A retenir

  • Le surentraînement n’est pas qu’une question de muscles : c’est un déséquilibre global entre effort, récupération et stress.
  • Repos, alimentation, sommeil et écoute du corps sont les meilleures armes pour l’éviter.
  • Un suivi régulier (fréquence cardiaque, ressenti, sommeil, humeur) permet de repérer les signaux faibles avant qu’il ne soit trop tard.
  • En cas de fatigue persistante, mieux vaut consulter un professionnel de santé ou un entraîneur expérimenté.

En conclusion

Le surentraînement n’arrive pas du jour au lendemain, mais il s’installe insidieusement quand on oublie de s’écouter. En sport comme en montagne, la performance durable passe avant tout par le respect de ses limites et le plaisir de s’entraîner. Mieux vaut parfois lever le pied pour mieux repartir ensuite.

Cet article ne remplace absolument pas l’avis d’un professionnel de santé, il est important de se renseigner et de consulter dès que possible si vous êtes sujet à ce type de syndrome.

Sources scientifiques

  • Meeusen R. et al. (2013). Prevention, diagnosis and treatment of the Overtraining Syndrome: Joint consensus statement of the European College of Sport Science and the American College of Sports Medicine. Medicine & Science in Sports & Exercise, 45(1), 186–205.
  • Kreher J. B., & Schwartz J. B. (2012). Overtraining Syndrome: A Practical Guide. Sports Health, 4(2), 128–138.
  • Halson S. L. (2014). Monitoring Training Load to Understand Fatigue in Athletes. Sports Medicine, 44(S2), 139–147.
  • Kellmann M., & Kallus K. W. (2001). Recovery-Stress Questionnaire for Athletes: User Manual. Human Kinetics.
  • Mountjoy M. et al. (2018). Relative Energy Deficiency in Sport (RED-S): 2018 Update. British Journal of Sports Medicine, 52(11), 687–697.
  • Carrard J., Pichot V., & Schmitt L. (2022). Overtraining Syndrome: What’s New in Diagnostics? Frontiers in Sports and Active Living, 4, 811016.

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