Traversée de Madère en 5 jours
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Sommaire
ToggleObjectif : traverser toutes les îles ?
Après avoir traversé la Corse avec le GR20, je cherchais une nouvelle île en Europe à traverser. C’est ainsi que je me suis rapidement intéressée à l’île de Madère, réputée pour ses nombreux sentiers de randonnée et ses paysages variés. De plus en plus prisée par les touristes, je voulais toutefois découvrir des sentiers permettant de se ressourcer loin des foules. Comme aucun GR officiel ne traverse l’île, ce défi m’a semblé d’autant plus accessible. Inspirée par la MIUT Madeira, un ultra-trail de 115 km et 6 000 m de dénivelé positif reliant l’île d’est en ouest, il m’a paru évident qu’une traversée pédestre sur plusieurs jours était réalisable pour explorer cette magnifique destination.
Pour cette aventure, j’ai embarqué deux de mes meilleurs amis, débutants en trek. Nous nous sommes lancés dans cette traversée en autonomie complète sur 5 jours.
Une traversée sur mesure
Il n’existe pas de sentier balisé type GR pour traverser Madère. Si les randonnées à la journée sont nombreuses et facilement accessibles, il est plus difficile de trouver un itinéraire précis reliant les principaux points emblématiques de l’île.
En m’appuyant sur la trace de la MIUT Madeira et les conseils d’un blog spécialisé (Hikingfex – Randonnée longue distance à Madère), j’ai tracé un itinéraire sur mesure pour une traversée complète d’ouest en est en 5 jours.
Etapes de notre parcours :
• Jour 1 : De Ponta De Sao Lourenco à Ponta Do Bode — 14,3 km | +1036 m de dénivelé | ~5h20 (pauses incluses).
• Jour 2 : De Ponta Do Bode à Chao Das Feitorias – Machico — 23,4 km | +1508 m | ~9h.
• Jour 3 : De Chao Das Feitorias – Machico au Pico Ruivo (via Pico do Arieiro) — 14,5 km | +1110 m | ~6h.
• Jour 4 : De Pico Ruivo à Bica da Cana — 18 km | +1056 m | ~8h.
• Jour 5 : De Bica da Cana à Porto Moniz (via Seixal et Fanal) — 28,7 km | +1000 m | ~10h.
Déroulé de nos journées :
Jour 1 : Ponta de São Lourenço → Ponta do Bode
Première journée plutôt tranquille, histoire de se mettre en jambes. L’objectif était d’atteindre le point de départ de notre rando, à Ponta de São Lourenço, depuis Funchal. On a utilisé l’application Bolt, qui marche super bien sur l’île (petit conseil : si vous comptez vous déplacer uniquement en taxi ou transport, jetez-y un œil régulièrement ; les bus existent, mais niveau fiabilité des horaires, c’est pas encore ça).
Bonus : les chauffeurs sont plutôt cools. Le nôtre nous a même laissé faire une petite halte chez un commerçant pour acheter une bonbonne de gaz, sans frais supplémentaires.
Une fois équipés, on s’est lancé dans le tour de Ponta de São Lourenço. C’est un coin magnifique, mais très fréquenté, ça ressemble parfois plus à une autoroute qu’à une escapade sauvage. Après cette boucle express, on est redescendu vers Caniçal pour refaire le plein d’eau, avant de remonter vers Ponta do Bode pour planter la tente en bord de falaise (l’aire de camping de São Lourenço étant fermée).
Petit rappel : le bivouac sauvage est interdit à Madère, mais des aires de camping gratuites sont aménagées un peu partout pour les randonneurs.
Jour 2 : Ponta do Bode → Chão das Feitorias (Machico)
La journée a démarré avec un réveil vue mer, puis une jolie balade en longeant les falaises, avant de plonger au cœur de l’île, entourés de verdure et de végétation luxuriante.
On a poursuivi jusqu’à notre aire de bivouac réservée, Chão das Feitorias.
À savoir : sur cette étape, aucun point d’eau potable sur la route. Vous croiserez pourtant pas mal de levadas, ces petits canaux d’irrigation creusés à flanc de montagne, qui transportent l’eau des hauts plateaux vers les villages. Attention, cette eau sert à l’irrigation, donc évitez d’y tremper vos chaussures ou de la polluer. En revanche, avec un filtre, il est tout à fait possible de se réapprovisionner dans les courts d’eau.
Le campement de Chão das Feitorias dispose d’un robinet d’eau potable et d’une belle prairie pour planter la tente.
Jour 3 : Machico → Pico Ruivo (via Pico do Arieiro)
Cette étape nous a menés vers le sommet de l’île : le Pico Ruivo, en passant par le célèbre Pico do Arieiro. Petite pause au Pico do Arieiro : il y a de quoi grignoter ou acheter quelques snacks. Attention, la météo change vite par ici : les sommets se couvrent souvent dès la fin de matinée, comme on a pu le constater ce jour-là.
Le sentier entre Arieiro et Ruivo, surnommé Pico to Pico, est une randonnée incontournable. Pour en profiter au mieux, partez tôt ! Malheureusement pour nous, arrivés en fin de matinée, on a eu droit au combo nuages + pluie pour terminer la journée ; classique à Madère dès qu’on prend un peu d’altitude.
On a bivouaqué près du refuge du Pico Ruivo, qui dispose d’eau potable, de sanitaires (sans douche) et d’une cuisine rudimentaire (pensez à amener un réchaud).
Jour 4 : Pico Ruivo → Bica da Cana
Lever ultra-matinal pour ne pas rater l’un des plus beaux spectacles de Madère : le lever de soleil sur une mer de nuages à 360°. Un moment magique ! On en a profité pour sécher les affaires détrempées de la veille, avant de descendre vers Boca da Encumeada pour se ravitailler et manger autre chose que du lyophilisé.
Direction ensuite Bica da Cana, en passant par une route officiellement fermée aux voitures (et pas super recommandée pour les piétons non plus) à cause d’éboulements. Pour couronner le tout, la pluie était de retour, et le sentier que nous empruntions comprenait de nombreux passages sous cascade : une journée rafraichissante. Côté paysages, on s’est régalés, même si côté confort c’était plutôt ambiance « lessive ambulante ».
Le campement de Bica da Cana propose de l’eau potable, des sanitaires et un abri sommaire pour cuisiner.
Jour 5 : Bica da Cana → Porto Moniz
Après deux jours de pluie, motivés comme jamais (et surtout parce que nous n’avions plus un seul vêtement sec), on a décidé de faire une longue dernière étape d’une traite. Départ dès le lever du soleil, sous un ciel enfin dégagé, direction Seixal pour une pause déjeuner. On n’a pas poussé jusqu’à la plage de sable noir cette fois, mais si vous avez le temps, elle vaut clairement le détour !
Après la pause, cap sur Fanal et sa forêt mystique, puis descente en longeant la crête vers Porto Moniz. Petite précision : sur cette portion, les sentiers piétons longeant certains tunnels étaient fermés suite à des éboulements, il faudra donc improviser ou assumer le risque de passer quand même.
Notre aventure en quelques mots
J’ai plutôt l’habitude de partir en randonnée seule, que ce soit à la journée ou sur plusieurs jours. La montagne, pour moi, c’est mon refuge, mon sas de décompression, le genre d’endroit où je prends le temps pour moi et où chaque trek, même sans drame, devient une vraie petite aventure perso.
Mais cette fois, j’ai troqué la solitude contre la bonne compagnie, et franchement, partager ce genre d’expédition avec ses meilleurs amis, c’est encore mieux ! Passer ses journées à marcher, papoter, rigoler, refaire le monde au détour de chaque montée et affronter les galères ensemble, ça change la donne. À plusieurs, même sous la pluie, les moments compliqués se transforment en souvenirs épiques plutôt qu’en misères solitaires.
On a tenté cette traversée de Madère fin avril, début mai 2024, une période parfaite sur le papier : des températures douces et une météo qui sait rester joueuse. Le matin, grand ciel bleu, et l’après-midi, douche gratuite offerte par les nuages. Autant dire que sans vêtements imperméables, tu finis trempé, sourire compris (ou pas).
Et même si le terrain est plutôt doux comparé à certains GR bien costauds, ce sont surtout les conditions météo qui dictent si ta randonnée sera une balade de santé ou un Koh-Lanta version détrempée. La pluie quasi quotidienne a bien pimenté notre périple : vêtements trempés H24, écran de téléphone inutilisable pour se repérer sur les cartes, nuits humides, et zéro douche pendant plusieurs jours.
En revanche, comme ce n’est pas un GR répertorié, nous avons été les seuls à faire cette traversée au moment où nous y étions. Bien-sûr, nous croisions du monde sur les spots très connus comme São Lourenço, Pico do Arieiro ou Pico Ruivo, mais le reste a été très calme et ressourçant.
Et si on parle paysage, Madère est un cadre incroyable : falaises spectaculaires, forêts de contes, crêtes acérées, plaines verdoyantes… chaque jour avait son lot de cartes postales. Les sentiers sont loin d’être techniques, mais par contre, les escaliers eux, se comptent par milliers.
Petit conseil d’ami : démarre tes journées tôt, c’est le seul moyen d’admirer la vue avant que les nuages ne tirent le rideau.
Bref, un trek unique, entre copains, paysages incroyables et météo capricieuse — une aventure qu’on n’est pas près d’oublier !
Trucs & Astuces :
Nourriture : Prévoyez des réserves pour 5 jours, mais notez qu’il est possible de se ravitailler à Pico do Arieiro, Pico Ruivo, Boca da Encumeada, Seixal et Porto Moniz si vous passez spécifiquement par ces villes.
Réservations : Le camping sauvage est interdit. Réservez vos aires de bivouac ici.
Points d’eau : La plupart des campings disposent d’eau potable. Vérifiez les disponibilités lors de votre réservation.
Météo : Le climat est très changeant, similaire à celui de La Réunion. Préparez-vous à la pluie, surtout en altitude.
Équipement : Si vous voulez manger chaud, un réchaud est indispensable. Certains campings disposent de barbecues en pierre, mais il est préférable d’avoir votre propre matériel.










